Nuit écrasante. [libre]

Elim se cogna la truffe dans la poussière. La taupe qu'il poursuivait s'était caché à l'intérieur d'une crevasse de la paroi. Le loup tenta d'y passer la mâchoire avant d'abandonner. La faiblesse n’amène qu’à la mort. Et la faim qui tenaille le loup commence à se faire de plus en plus sentir. Elim est moins rapide et toujours en alerte. Le moindre grattement le fait bondir à la recherche de nourriture. Pour l'instant il n'a pas peur. Il a connu bien des jours sans proie et il est toujours là. Mais le manque de gibier monopolise ses pensées et le rend irritable à mesure que le signal de détresse de son estomac tourne en boucle dans son cerveau. Elim reprend la route. Ce n'est pas la faim qui fait bouger son corps maigre de façon saccadée mais ses pattes un peu trop longues.

La nuit n’apaise pas Elim. Elle l'étouffe. Elle l’entraîne dans un cercle vicieux de remise en question. Dans cette absence de bruit et cette obscurité le loup ne peut retenir ou freiner ses pensées. Il ne trouve pas le repos, alors que les "Et si..." se bousculent et reviennent comme un refrain. Et s'il avait pu les sauver? Et s'il les avait condamnés? Alors Elim, a choisi de marcher, d'avancer pour mettre à profit ce temps que le sommeil refuse de prendre. La nuit pèse sur lui. Elim ne s'est jamais sentit aussi insignifiant. Il n'admet pas lui-même qu'il ne cherche pas, au fond, qu'à fuir ses fantômes où à trouver de quoi manger. Le loup veut oublier qu'il a besoin d'une présence qui lui rappelle qu'il y a de la vie. Même au fin fond d'un abysse noir. Elim ne sais pas où il va, cependant il ne changera pas de chemin. Quelle importance de toute façon?

Elim est comme tous les autres. Même les plus obstiné finissent par craquer. Et si notre loup dresse les oreille ce n'est pas justement pour trouver une proie. Mais aussi pour guetter une voix qui brisera le silence... Le loup est à la recherche d'une sortie depuis tellement longtemps qu'il ne sait plus d'où il vient. Pourtant il n'abandonne pas. Il ne peut pas laisser tomber. Une force à laquelle il ne peut résister et qui le pousse en avant. C'est comme si, au fond de ses entrailles il savait qu'elle est là. Qu'il pourrait la trouver...

Elim relève la tête d'un coup. Le loup a flairer une subtile différence dans l'air. Parmi l'odeur d'humidité et de moisissures, une autre plus saine. Celle d'un canidé. Il est encore trop loin pour qu'il sache s'il s'agit d'une femelle ou d'un mâle, d'un loup ou d'un chien. Mais l'autre vient vers lui. Elim est divisé entre le soulagement et l’inquiétude. Lui qui ne voulait plus de la solitude sale et sournoise qui le rendait fou craignait maintenant une attaque. Le loup se raisonna. A quoi lui servait l'appréhension? Il ne pourrait peut-être pas fuir à cause de la fatigue, encore moins se battre... Il continue à avancer prêt à croiser le premier être vivant depuis longtemps.